Savoir prendre le temps et ne pas précipiter les choses est une des plus importantes leçons que nous enseigne le passé. Cela s'applique dans bien des domaines, entre autres dans celui du plaisir. La recherche de la satisfaction est une tendance naturelle qui guide la plupart de nos actions. Mais que gagnons-nous (ou perdons-nous) à satisfaire toutes nos envies instantanément? Je vous propose une petite réflexion sur les avantages à tirer en prenant plus notre temps lorsqu'il s'agit de se faire plaisir.
Avec à notre disposition des outils comme internet, nous avons au bout de nos doigts le pouvoir de combler presque toutes nos envies. Un film peut être vu directement, un achat se fait en un clic et nous est livré en quelques jours à peine, une information est trouvée en deux temps trois mouvements. En moins de temps qu'il ne faut pour y songer, on obtient satisfaction. Et il y a un effet d'accoutumance à cette immédiateté, on s'y habitue.
Devoir attendre entre le moment où une envie nous vient et le moment de la satisfaire nous arrive de moins en moins souvent, si bien que l'on supporte assez mal d'être obligé d'attendre. En marquant un long moment de répit entre une envie et son actualisation, l'instant de satisfaction en est plus réjouissant, il est comme décuplé. C'est ce que j'appellerais "l'effet de l'attente". Un contre-temps que l'on a de moins en moins l'habitude de subir.
C'est pourtant bien dans l'attente que se construit l'ampleur du plaisir qu'on tirera plus tard. Je dirais que le délais d'attente est à la mesure de la satisfaction future. Plus on attend, plus on sera content au final. L'aboutissement devient une sorte de récompense, il y a une qualité de mérite qui vient s'ajouter à sa valeur. Et puis il y a la magie de l'anticipation qui opère: on projette, on espère, et à notre insu, on est déjà entrain de former le bonheur qu'on éprouvera.
Il a déjà été prouvé que nous tirons une partie de notre satisfaction dans l'anticipation d'un moment agréable. Quand on réserve des vacances, par exemple, l'idée seulement de partir et la réjouissance à l'avance, font déjà partie du bonheur qu'on en tirera. Il se passent donc en réalité beaucoup de choses rien que dans l'attente. C'est tout un chemin qui mène à un aboutissement, et toute une part de plaisir que l'on perd en zappant cette étape.
Si autrefois l'attente était subie et que bien souvent, on ne pouvait pas faire autrement, aujourd'hui nous avons beaucoup à gagner en nous y forçant de temps à autre. Rappelons-nous du temps où il fallait attendre l'été pour avoir des fraises, où il fallait attendre qu'un cinéma programme un film pour pouvoir le voir, où il fallait attendre plusieurs jours pour qu'une lettre arrive à destination. L'instantané a pris le contrôle sur nos vies, et il s'agit d'un réel acte de résistance que de s'y opposer volontairement. Réapprendre à attendre, c'est redonner du goût au bonheur, et ne pas le prendre pour acquis.
Quelques pistes pour réapprendre à attendre et en tirer le meilleur:
- Programmez les choses longtemps à l'avance: une sortie entre amis, une séance cinéma, ou même des petites choses comme le repas du soir ou un moment pour se livrer à son passe-temps favori, c'est en les prévoyant avec une longueur d'avance qu'on les savoure le mieux.
- Faites des listes: un livre vous fait envie? Un ami vous recommande un film? Vous tombez par hasard sur une recette alléchante? Prenez-en note sous forme de listes que vous consulterez plus tard.
- Cherchez d'autres points d'accès qu'internet: plutôt que de commander en ligne le vêtement dont vous rêvez, déplacez-vous en personne dans le magasin. Laissez de temps en temps tomber la facilité d'internet pour vous donnez la peine de faire l'effort et de passer le temps nécessaire avant de vous faire plaisir.
- Faites-vous des promesses à vous-même: au lieu de directement aboutir à une envie, promettez-vous d'y accéder dans un certain délais. Par exemple: "ce weekend, je regarderai ce film", ou bien "la semaine prochaine, je commanderai un plat chez mon traiteur préféré".
- Ne fuyez pas les situations où vous n'avez pas le contrôle: un petit cinéma de quartier où il n'y a qu'un film par jour, une piscine dont les horaires sont un peu contraignants... il est parfois bon de ne pas avoir le choix, de devoir se plier à des contraintes extérieures et de ne pas avoir ce qu'on a envie, quand on en a envie.
- Forcez-vous tout simplement à attendre: même si vous avez la possibilité de tout de suite vous faire plaisir, reportez volontairement. Si vous avez le DVD d'une série, par exemple, obligez-vous à n'en regarder qu'un épisode à la fois. Cela requiert d'une bonne maîtrise de soi, mais débouche sur une plus grande satisfaction au bout du compte.
Je suis convaincue des bénéfices de l'attente, et je suis adepte à m'y forcer parfois quand les circonstances ne m'y obligent pas. La trop grande facilité actuelle à arriver rapidement à nos fins a endommagé le plaisir qu'on en tire. Je pense qu'il n'y a pas de plaisir là où il n'y a pas eu de frustration. En suivant ces quelques pistes et en réfléchissant vous-même à la place que prend l'attente dans votre expérience du bonheur, j'espère que vous arriverez à mieux profiter de chacune de vos envies.
Bonjour,
RépondreSupprimerComme cela fait plaisir de lire votre avis sur l'attente !
Je fais partie de la paroisse de mon village et pour le journal paroissial, j'ai émis mon sentiment que l'attente était un sentiment très agréable avant chaque chose ou chaque évènement positif et comme c'est bientôt le temps de l'Avent pour les chrétiens, on m'a demandé si je voulais bien faire un article et je recherchais ce matin sur le net des inspirations qui pouvaient étailler mon opinion .... et me voilà sur votre blog !
Après avoir parcouru différents avis qui malheureusement suggéraient le contraire, je suis heureuse de vous lire ... Merci, un peu d'obtimisme fait vraiment du bien dans ce monde de dingue !
Très bonne journée !
Isabelle Leprêtre