jeudi 21 juillet 2016

A Connecticut Yankee at King Arthur's Court: quand Mark Twain nous fait voyager dans le temps


Que se passe-t-il quand un mécanicien du dix-neuvième siècle se retrouve accidentellement transporté au Moyen Age de la cour du roi Arthur et ses chevaliers? Il se passe pas mal de scènes insolites, de quiproquos résultant d'un inévitable choc des cultures et beaucoup, beaucoup d'aventures. Mais quand ledit mécanicien se met en tête de moderniser le sixième siècle en y apportant les avancements technologiques et sociaux de son époque, alors l'Angleterre est sans dessus-dessous, ses habitants décontenancés et le lecteur plus amusé que jamais. Ce sont ces folles péripéties que Mark Twain décrit dans ce roman, avec humour, détachement et une bonne dose d'ironie.

Hank Morgan, le héro, a plus d'un tour dans son sac. Après s'être sauvé de justesse des flammes du bûcher en prédisant un éclipse du soleil, le roi et sa cour le prennent pour un mage puissant (plus puissant, sans doute, que Merlin lui-même, lequel est constamment tourné en ridicule dans ce récit). Il fabrique de la poudre explosive, répare un puis dont l'eau est réputée sacrée avec force effets spectaculaires, il installe des lignes téléphoniques qui lui permettent de prévoir l'arrivée du roi dans un village (ce qui le hisse au rang de devin), etc. En bref, il devient l'homme le plus influent du royaume, bras droit du roi Arthur et libre dans ses agissements et entreprises. Ce pouvoir et cette liberté lui permettent de mettre en place un immense projet qui va révolutionner l'Angleterre médiévale: il va apporter la civilisation du dix-neuvième siècle.

Tout cela résulte bien sûr en un récit palpitant, plein d'aventures et de rebondissements. Les rencontres qui ponctuent les périples de Hank sont toutes plus cocasses les unes que les autres et le décalage entre lui et les habitants de Camelot est source de nombreuses scènes désopilantes. L'histoire est racontée par Hank lui-même, et son ton ironique apparenté à son point de vue d'Américain des années 1880 convergent en un humour décalé, perçant et satirique. Le monde de Camelot et ses traditions vus à travers le yeux d'un Yankee, c'est un univers étrange, qui fourmille d'absurdités et d'aberrations en tous genres. Tout le système est mis au pilori, et son jugement est sévère, mais, il faut le dire, très souvent juste...

Une des illustrations qui apparaissent dans le livre (par Dan Beard)
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Mais si ce roman est captivant et drôle à la fois (ce qui en soit en ferait déjà un excellent divertissement), il est aussi intelligent et donne à réfléchir. On peut tirer beaucoup de choses de ce livre, outre l'amusement qu'il ne peut manquer de susciter. Critique des sociétés anciennes et modernes, réflexion sur les véritables apports du progrès, remise en question de l'ordre établi, considération sur l'égalité des hommes entre eux (ou sur ce manque d'égalité)... Mais ce qui transparaît le plus clairement, au final, c'est que nous sommes tous des produits de la société dans laquelle nous avons évolué. Croyances, habitudes, façon de voir le monde... tout nous vient de cette "éducation" culturelle, à laquelle on n'échappe pas. Il a beau se moquer des moyenâgeux et de leur obscurantisme et leur naïveté, l'idéalisme de Hank et sa confiance inaltérable dans le progrès ne sont peut-être pas si éloignés de la foi aveugle qu'il déplore tellement chez eux. Et ni Hank, ni ses amis du Moyen Age, n'ont plus raison les uns que les autres.

J'ai lu quelque part que les histoires de voyages dans le temps ont déjà été tellement écrites que plus personne ne devrait s'y atteler à moins de n'avoir une idée innovante en la matière. Ce roman a été publié en 1889, et doit sans doute être l'un des premiers du genre à avoir jamais été écrits, et pourtant, s'il venait d'avoir été publié, je me serais dit: "voilà un roman innovant, qui réinvente et fait quelque chose de constructif du classique voyage dans le temps". Plongez-vous dans ce livre et vous partirez pour un voyage à travers les siècles qui vous entraînera du rire au larmes, sera aussi ludique qu'instructif et aussi divertissant que provocant.


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